Conakry, 27 juin 2025 – Dans une déclaration empreinte de gravité et de lucidité, Joachim Baba Millimouno, politologue et membre influent du Bureau Exécutif de l’Union des Forces Démocratiques de Guinée (UFDG), est sorti de son silence. Ex-coordinateur de la cellule de communication du parti, il dénonce l’absence de dialogue, les exclusions et les dérives internes, tout en appelant à un sursaut pour sauver l’idéal démocratique porté par l’UFDG.
« Il est des silences qui deviennent des trahisons », lance-t-il, citant les Écritures pour justifier sa prise de parole. Selon lui, le climat actuel au sein de l’UFDG est marqué par un verrouillage du débat, des exclusions arbitraires et un refus d’alternance, contraires à l’esprit démocratique qui a fondé le parti.
Depuis la publication du mémorandum signé le 4 avril dernier par plusieurs secrétaires fédéraux de la Haute Guinée et de la Guinée forestière, les tensions internes n’ont cessé de s’accentuer. Ce texte, qualifié de « fraternel » par ses initiateurs, a pourtant été perçu par la direction du parti comme un acte de défiance, entraînant des sanctions disciplinaires, dont la révocation de Joachim Baba Millimouno de son poste.
Pour ce dernier, il ne s’agit nullement d’un acte de rébellion, mais d’une main tendue et d’un appel au débat. « Je demeure membre de l’UFDG, par fidélité à notre combat, à notre histoire commune, et surtout au peuple guinéen qui garde espoir en nous », affirme-t-il.
Un leadership contesté
Joachim Baba Millimouno revient également sur l’histoire du parti et sur le choix stratégique, en 2007, de confier la présidence de l’UFDG à Cellou Dalein Diallo. Selon lui, cette décision, prise par le doyen Bah Mamadou malgré des réserves internes, portait l’espoir d’un renouveau. Mais dix-huit ans plus tard, cet espoir, estime-t-il, a été trahi par l’absence d’alternance et la personnalisation du pouvoir au sein du parti.
« Il est temps d’en finir avec la déification d’un homme, aussi charismatique soit-il », martèle-t-il, dénonçant un fonctionnement où le culte de la personnalité a pris le pas sur le débat d’idées et l’alternance générationnelle.
Un congrès sous tension
À quelques jours du congrès de l’UFDG, prévu le 6 juillet prochain, les critiques se multiplient. Joachim Baba Millimouno pointe du doigt des « irrégularités flagrantes » : refus d’appliquer une décision de justice, composition opaque des organes préparatoires, verrouillage du débat, exclusions ciblées…
Il invite les militants et responsables à « exiger le respect scrupuleux des textes du parti » et à faire de ce congrès un rendez-vous démocratique, inclusif et transparent.
Cohérence et crédibilité
Faisant le lien entre la situation interne du parti et l’actualité nationale, il estime que l’UFDG ne peut pas légitimement dénoncer les dérives des autorités s’il ne sait pas garantir lui-même la démocratie en son sein. L’exemple récent du non-enrôlement de Cellou Dalein Diallo à Abidjan, le 25 juin, présenté par certains comme une manœuvre d’exclusion orchestrée par la transition, soulève selon lui un problème de cohérence. « Comment dénoncer l’injustice si nous l’exerçons en interne ? Comment exiger de l’État ce que nous ne savons pas garantir dans notre propre maison ? », questionne-t-il.
Soutien au CNRD et appel à l’apaisement
Joachim Baba Millimouno assume par ailleurs son engagement auprès du CNRD, non par renoncement à ses convictions d’opposant, mais par sens des responsabilités citoyennes. « Travailler avec les autorités de la transition, ce n’est pas trahir l’opposition, c’est répondre à l’appel du réel », explique-t-il.
Face aux crispations internes et aux divisions, il en appelle à la fin des logiques de haine et de confrontation stérile, plaidant pour une réforme profonde du parti et une refondation démocratique à la hauteur des aspirations du peuple guinéen.
« La patrie avant le parti », conclut-il, soulignant que seule une UFDG réformée, ouverte et fidèle à ses valeurs démocratiques peut prétendre être un acteur crédible de la construction d’une Guinée nouvelle.
L rédaction